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  • Pauvreté Virulente: Quand la Misère Engendre la Maladie

    Pauvreté Virulente: Quand la Misère Engendre la Maladie

    Ah, mes chers lecteurs! Préparez-vous, car aujourd’hui, je vous emmène dans les entrailles sombres de notre belle Paris, là où la misère se nourrit de l’ombre et où la maladie danse une valse macabre avec la mort. Oubliez les salons dorés, les robes chatoyantes et les rires cristallins. Ici, il n’y a que le gémissement des mourants, l’odeur âcre de la décomposition et la toux rauque qui résonne dans les ruelles étroites. Nous allons explorer un Paris que l’on préfère ignorer, un Paris où la pauvreté, tel un poison virulent, gangrène les corps et les âmes.

    Imaginez, si vous le voulez bien, une ruelle pavée de crasse, si étroite que le soleil peine à y percer. Des immeubles décrépits se dressent de chaque côté, leurs fenêtres aveugles fixant le sol comme autant de témoins silencieux de la souffrance. L’air y est lourd, saturé d’humidité et d’effluves pestilentiels. C’est dans cet environnement hostile que vivent, ou plutôt survivent, des familles entières, entassées dans des logements insalubres, proies faciles pour les maladies les plus infâmes. Suivez-moi, mes amis, car nous allons frapper à la porte de l’une de ces familles, une famille dont le destin tragique illustre parfaitement le lien funeste entre la misère et la maladie.

    La Cour des Miracles Moderne

    Nous voici donc devant une porte délabrée, à peine maintenue par des gonds rouillés. L’odeur qui s’en échappe est insupportable : un mélange de sueur, d’urine, de nourriture avariée et, plus inquiétant, une pointe de cette odeur douceâtre et nauséabonde qui annonce la fièvre. Je frappe, hésitant. Un silence pesant répond, puis un faible gémissement. Enfin, la porte s’ouvre, dévoilant une pièce sombre et exiguë. Un seul rayon de lumière filtre à travers une fenêtre sale, révélant un spectacle désolant.

    Au centre de la pièce, sur une paillasse crasseuse, gît une femme, à peine trente ans, mais déjà marquée par la vie. Ses yeux sont cernés, ses joues creuses et sa peau a pris cette teinte jaunâtre caractéristique des maladies du foie. Elle tousse, une toux profonde et douloureuse qui semble lui déchirer les poumons. À ses côtés, deux enfants, un garçon d’environ sept ans et une fillette d’à peine cinq, la regardent avec des yeux effrayés. Le plus jeune a le ventre gonflé et des jambes anormalement fines, signes évidents de malnutrition. La misère, ici, n’est pas une abstraction, c’est une réalité palpable, une force destructrice qui ronge les corps et les esprits.

    “Madame,” dis-je, essayant de masquer mon émotion, “je suis un journaliste. Je voudrais vous aider. Quel est votre nom?”

    La femme me regarde avec méfiance, puis un sourire triste se dessine sur ses lèvres. “Je m’appelle Marie,” répond-elle d’une voix faible. “Et ce sont mes enfants, Jean et Sophie. Mon mari… mon mari est mort il y a un mois. Une mauvaise fièvre, comme celle qui me ronge maintenant.”

    Je comprends alors l’étendue de la tragédie. Marie est veuve, malade et sans ressources. Ses enfants sont malnutris et exposés aux mêmes dangers qui ont emporté leur père. La misère, ici, est un cercle vicieux impitoyable.

    Le Fléau du Choléra

    Quelques jours plus tard, alors que je tentais d’organiser une aide pour Marie et ses enfants, une nouvelle terrible frappa Paris : le choléra. Cette maladie terrible, importée des contrées lointaines, se propageait à une vitesse effrayante, fauchant des vies par milliers. Et comme toujours, ce sont les plus pauvres qui en furent les premières victimes.

    Les quartiers insalubres, avec leurs eaux stagnantes, leurs égouts à ciel ouvert et leur promiscuité effroyable, devinrent de véritables foyers d’infection. Les hôpitaux étaient débordés, les médecins impuissants et la panique s’emparait de la population. J’ai vu des familles entières décimées en quelques jours, des corps entassés dans les rues, des fossoyeurs travaillant jour et nuit pour enterrer les morts.

    Je me suis précipité chez Marie, craignant le pire. Malheureusement, mes craintes étaient justifiées. Jean, le petit garçon, était couché sur la paillasse, ses yeux révulsés, son corps agité de convulsions. Marie, malgré sa propre maladie, tentait de le réconforter, mais elle était elle-même au bord de l’épuisement. Sophie, blottie dans un coin, pleurait silencieusement.

    “Le choléra,” me dit Marie, les larmes aux yeux. “Il l’a pris si vite. Je ne sais plus quoi faire.”

    J’ai immédiatement couru chercher un médecin, mais il était déjà trop tard. Jean mourut quelques heures plus tard, laissant sa mère et sa sœur dans un désespoir absolu. J’ai assisté à l’enterrement, un enterrement misérable, sans prêtre ni cérémonie. Le corps du petit garçon fut jeté dans une fosse commune, parmi des dizaines d’autres victimes du choléra. Le spectacle était déchirant.

    Les Conséquences de l’Ignorance

    La mort de Jean n’était pas seulement une tragédie individuelle, c’était aussi le symbole de l’indifférence de la société envers les plus démunis. Les autorités, aveuglées par leurs préjugés et leurs intérêts, refusaient de voir la réalité en face. Elles préféraient blâmer les pauvres pour leur propre malheur, les accusant d’être sales, paresseux et immoraux. Elles ignoraient superbement que la pauvreté était la principale cause de la maladie et que les conditions de vie insalubres rendaient les populations vulnérables aux épidémies.

    J’ai tenté, à travers mes articles, de dénoncer cette injustice, de sensibiliser l’opinion publique et de pousser les autorités à agir. J’ai décrit les logements insalubres, les égouts à ciel ouvert, la malnutrition, le manque d’hygiène et l’absence de soins médicaux. J’ai interviewé des médecins, des travailleurs sociaux et des habitants des quartiers pauvres. J’ai recueilli des témoignages poignants, des histoires de souffrance et de courage qui m’ont profondément marqué.

    Mais mes efforts se sont heurtés à l’indifférence et à l’hostilité. Les journaux bourgeois refusaient de publier mes articles, les politiciens me traitaient de trouble-fête et les bien-pensants me reprochaient de semer la discorde. On me disait que la pauvreté était une fatalité, qu’il y avait toujours eu des riches et des pauvres et qu’il était vain de vouloir changer l’ordre des choses. J’étais seul, impuissant face à l’immensité du problème.

    L’Espoir Fragile

    Malgré tout, je n’ai pas désespéré. J’ai continué à écrire, à témoigner, à alerter l’opinion publique. Et petit à petit, j’ai senti que les mentalités commençaient à évoluer. Des voix se sont élevées pour dénoncer l’injustice, des associations se sont créées pour aider les plus démunis et des projets d’amélioration des conditions de vie ont été mis en place.

    J’ai réussi, avec l’aide de quelques amis, à trouver un logement plus salubre pour Marie et Sophie. J’ai également veillé à ce qu’elles reçoivent une alimentation correcte et des soins médicaux réguliers. Marie, grâce à ces efforts, a commencé à se rétablir. Elle a trouvé un petit emploi de couturière et Sophie a été admise dans une école gratuite.

    Je ne prétends pas avoir résolu le problème de la pauvreté, loin de là. Mais j’ai au moins contribué à améliorer la vie de deux êtres humains et à semer les graines d’un avenir meilleur. J’ai appris que même dans les ténèbres les plus profondes, il est toujours possible de trouver une étincelle d’espoir et que même les efforts les plus modestes peuvent faire une différence.

    L’histoire de Marie et de ses enfants est une illustration poignante du lien funeste entre la misère et la maladie. Elle nous rappelle que la pauvreté n’est pas seulement une question économique, c’est aussi une question de santé publique, de justice sociale et de dignité humaine. Il est de notre devoir, en tant que citoyens, de lutter contre cette injustice et de construire une société plus juste et plus solidaire, où chacun aura la possibilité de vivre dans la dignité et la santé.

  • La Mort à Chaque Coin de Rue: Chroniques de la Cour des Miracles

    La Mort à Chaque Coin de Rue: Chroniques de la Cour des Miracles

    Mes chers lecteurs, préparez-vous. Détournez le regard si vous le devez, car aujourd’hui, nous allons descendre dans les entrailles de Paris, là où la lumière du soleil se refuse d’entrer, là où la Seine semble elle-même retenir son souffle. Nous allons explorer la Cour des Miracles, non pas celle fantasmée par les romanciers à sensation, mais celle bien réelle, celle où la mort rôde, non comme un spectre, mais comme une compagne quotidienne, un hôte indésirable mais omniprésent. Oubliez les bals de l’Opéra, les salons bourgeois et les robes de soie. Ici, la soie est remplacée par des haillons, les bals par des râles et les sourires par des grimaces de douleur.

    Nous sommes en 1848, l’année des révolutions, mais ici, dans les profondeurs de la Cour, une autre révolution est à l’œuvre, une révolution silencieuse et implacable menée par la maladie, la misère et le désespoir. Oubliez les discours enflammés des tribuns, les barricades dressées avec fierté. Ici, la seule barricade est celle fragile que l’on tente d’ériger contre le froid, la faim et le mal. Ce sont les chroniques de cette guerre-là que je vous propose aujourd’hui, les chroniques de la mort qui frappe à chaque coin de rue.

    Le Royaume de la Phtisie

    La phtisie, cette consomption lente et cruelle, règne en maître incontesté sur la Cour des Miracles. Elle s’insinue dans les poumons, les ronge de l’intérieur et transforme peu à peu les corps en squelettes ambulants. J’ai vu des enfants, à peine sortis du berceau, dont la toux sèche et rauque, semblable au crissement d’une branche morte, annonçait déjà leur funeste destin. Les adultes, eux, luttent avec l’énergie du désespoir, mais la phtisie est une ennemie patiente et implacable. Elle leur vole leur force, leur appétit, leur sommeil et, finalement, leur vie.

    J’ai rencontré une jeune femme, Marie, à peine vingt ans, dont les yeux brillaient encore d’une lueur d’espoir malgré le mal qui la dévorait. Elle vivait dans une masure insalubre avec son mari, Jean, un chiffonnier au visage buriné par le soleil et les privations. Jean travaillait sans relâche pour tenter de subvenir à leurs besoins, mais la maladie de Marie absorbait toutes leurs maigres ressources. Un jour, je l’ai surpris en train de pleurer, non pas pour elle, mais pour son mari. “Qui prendra soin de lui quand je ne serai plus là ?” me confia-t-elle, la voix brisée par la toux. “Qui lui préparera sa soupe ? Qui lui réchauffera le cœur ?” Ces mots, simples et poignants, résonnent encore en moi comme un reproche silencieux à notre société, capable de laisser de telles misères s’épanouir à ses portes.

    Un médecin, le docteur Lemaire, un homme bon et dévoué, se battait corps et âme contre la phtisie. Mais il était seul, démuni face à l’ampleur du fléau. Il distribuait des remèdes, donnait des conseils, mais savait pertinemment que ses efforts étaient vains. “Le problème, me disait-il un jour, ce n’est pas la maladie, c’est la misère. Tant que ces gens vivront dans des taudis insalubres, nourris de pain rassis et d’eau croupie, la phtisie continuera à faire des ravages.” Ses paroles étaient amères, mais justes. La phtisie n’était qu’un symptôme, le symptôme d’une société malade de ses inégalités.

    Le Fléau du Choléra

    Et puis, comme si la phtisie ne suffisait pas, le choléra est venu frapper à la porte de la Cour des Miracles. Une épidémie foudroyante, qui transformait les corps en fontaines nauséabondes et emportait les plus faibles en quelques heures. La panique était à son comble. Les rues étaient jonchées de cadavres, les cris de douleur résonnaient jour et nuit. Les fossoyeurs, débordés, enterraient les morts à la hâte, sans cérémonie, sans prière.

    J’ai vu des familles entières décimées par le choléra. Des parents emportés en quelques heures, laissant derrière eux des enfants orphelins, livrés à eux-mêmes dans ce cloaque de misère. J’ai vu des mères supplier la mort d’épargner leurs enfants, offrant leur propre vie en échange. Mais la mort était sourde à leurs supplications. Elle frappait aveuglément, sans distinction, semant la désolation et la terreur.

    Un jour, j’ai rencontré un homme, Pierre, qui avait perdu sa femme et ses deux enfants en l’espace de quelques jours. Il errait dans les rues, hagard, le regard vide. Il ne parlait plus, ne pleurait plus. Il était comme mort à l’intérieur. Je lui ai tendu une pièce de monnaie, mais il l’a repoussée. “A quoi bon ?” m’a-t-il dit d’une voix rauque. “L’argent ne ramènera pas mes enfants.” J’ai compris alors que la misère matérielle n’était rien comparée à la misère morale, à la douleur indicible de perdre ceux que l’on aime.

    Le choléra a révélé au grand jour l’indifférence de la société envers les plus démunis. Les riches se barricadaient chez eux, craignant la contagion, tandis que les pauvres étaient laissés à leur propre sort, sans soins, sans assistance. Les autorités, dépassées par les événements, se contentaient de distribuer des doses massives de chlorure de chaux, un désinfectant plus symbolique qu’efficace. Le choléra, plus qu’une maladie, était un révélateur, un miroir impitoyable de nos propres faiblesses.

    La Dérision de l’Hygiène

    Dans la Cour des Miracles, l’hygiène était un concept abstrait, une notion aussi étrangère que la langue grecque. L’eau, rare et précieuse, était réservée à la boisson, et encore… La plupart du temps, elle était puisée dans des puits contaminés, transformant chaque gorgée en un pari risqué avec la maladie. Se laver était un luxe, un plaisir interdit. Les corps, couverts de crasse et de vermine, devenaient des terrains fertiles pour toutes sortes d’infections.

    Les latrines, quand elles existaient, étaient des cloacas à ciel ouvert, des foyers de pestilence qui empoisonnaient l’air et contaminaient les sols. Les ordures s’amoncelaient dans les rues, formant des montagnes puantes qui attiraient les rats et les mouches, vecteurs infatigables de maladies. Les enfants jouaient au milieu de ces immondices, inconscients du danger, respirant à pleins poumons l’air vicié. Comment s’étonner qu’ils tombent malades ? Comment s’étonner qu’ils meurent jeunes ?

    J’ai tenté de convaincre certains habitants de la Cour de l’importance de l’hygiène, mais mes efforts étaient vains. “A quoi bon se laver ?” me répondait-on avec fatalisme. “On est sale de toute façon. La crasse est notre lot, la maladie notre destin.” J’ai compris alors que l’hygiène n’était pas qu’une question de propreté physique, c’était aussi une question d’espoir, de dignité. Tant que ces gens vivraient dans la misère et le désespoir, ils ne verraient pas l’intérêt de se laver, de se soigner.

    Les Enfants Perdus

    Les enfants de la Cour des Miracles étaient les victimes les plus innocentes de cette misère. Ils naissaient dans la crasse, grandissaient dans la promiscuité et mouraient souvent avant d’avoir atteint l’âge adulte. Ils étaient livrés à eux-mêmes, sans éducation, sans protection, exposés à tous les dangers. Ils erraient dans les rues, mendiant leur pain, volant pour survivre, se prostituant parfois pour quelques sous.

    J’ai rencontré un petit garçon, Victor, à peine sept ans, qui vivait seul dans une ruelle sordide. Il avait les yeux tristes et le visage sale, mais il conservait malgré tout une étincelle de joie de vivre. Il me racontait des histoires, des contes de fées qu’il inventait pour oublier sa misère. Un jour, je l’ai retrouvé malade, fiévreux, gisant sur le pavé. Je l’ai emmené chez le docteur Lemaire, mais il était trop tard. Il est mort dans mes bras, en murmurant le nom de sa mère, qu’il n’avait jamais connue.

    La mort de Victor m’a bouleversé. Elle m’a rappelé que derrière les statistiques, derrière les chiffres, il y avait des êtres humains, des enfants innocents qui méritaient une vie meilleure. Elle m’a donné la force de continuer à témoigner, à dénoncer cette misère, à réclamer justice pour ces oubliés de la société. Car tant qu’il y aura des enfants qui meurent de faim et de maladie dans la Cour des Miracles, notre société sera coupable, complice de ce crime silencieux.

    La Cour des Miracles, mes chers lecteurs, est un lieu de souffrance et de désespoir, mais c’est aussi un lieu de courage et de résilience. Malgré la misère, malgré la maladie, les habitants de la Cour continuent de vivre, de lutter, d’espérer. Ils sont les oubliés de la société, mais ils sont aussi les témoins de notre propre humanité. N’oublions jamais leur histoire, n’oublions jamais leur souffrance. Car c’est en nous souvenant d’eux que nous pourrons construire un monde plus juste et plus humain. Et peut-être, un jour, la mort cessera de frapper à chaque coin de rue.

  • La Cour des Miracles: Un Cloaque de Misère Où la Peste Rôde!

    La Cour des Miracles: Un Cloaque de Misère Où la Peste Rôde!

    Le vent, porteur d’effluves fétides, s’engouffre dans les ruelles tortueuses, véritables boyaux purulents de cette ville que l’on ose encore appeler Paris. La nuit, épaisse comme un linceul, dissimule mal les plaies béantes de la misère. Ici, au cœur de la Cour des Miracles, la crasse est reine, la maladie, sa servante, et la mort, une invitée permanente. Les pavés, rarement lavés par la pluie, sont maculés d’immondices de toutes sortes, un mélange écœurant de détritus alimentaires, d’excréments et de liquides douteux, le tout grouillant d’une vie microscopique et menaçante. C’est dans cet antre de désespoir, où les ombres dansent une sarabande macabre, que notre récit prend racine, un récit de souffrance, de courage et de survie, mais aussi, et surtout, un avertissement à ceux qui, derrière les dorures et le faste, feignent d’ignorer l’existence de ce cloaque immonde.

    L’odeur est suffocante, un cocktail nauséabond de latrines à ciel ouvert, de linge crasseux jamais lavé, de chairs malades et de soupes rances. Elle vous prend à la gorge, vous écrase les poumons, vous imprègne les vêtements et vous suit, tel un spectre, bien après avoir quitté ce lieu maudit. Mais pour ceux qui y vivent, ceux qui n’ont connu que la misère et l’abandon, cette pestilence est presque une compagne, un rappel constant de leur condition, une sorte de baptême putride qui les unit dans la souffrance.

    La Misère, Reine des Lieux

    La Cour des Miracles. Un nom ironique, n’est-ce pas? Car ici, point de miracles, si ce n’est celui, amer et cruel, de survivre un jour de plus. Les habitations, si l’on peut les appeler ainsi, sont des masures délabrées, des cabanes faites de bric et de broc, de planches vermoulues et de toiles déchirées, à peine capables de protéger leurs occupants des intempéries. Le jour, la lumière filtre difficilement à travers les interstices, plongeant les intérieurs dans une pénombre constante, propice à la prolifération des rats et autres vermines. La nuit, l’obscurité est absolue, troublée seulement par la lueur vacillante de quelques chandelles misérables, et par les cris et les gémissements qui percent le silence.

    J’ai croisé, au détour d’une ruelle, une femme, le visage creusé par la famine, serrant contre elle un enfant maigre et fiévreux. Ses yeux, autrefois peut-être brillants d’espoir, étaient désormais éteints, résignés. Je lui ai tendu une pièce de monnaie, un geste insignifiant, je le sais, mais qui a suffi à raviver une étincelle dans son regard. “Merci, monsieur,” a-t-elle murmuré, d’une voix rauque, “que Dieu vous bénisse.” Mais quel Dieu, je me suis demandé, peut bien bénir un lieu pareil?

    Un peu plus loin, un groupe d’enfants, pieds nus dans la boue, se disputaient un morceau de pain moisi. Leur joie, aussi éphémère que fragile, contrastait douloureusement avec la misère qui les entourait. Ils étaient les enfants de la Cour des Miracles, condamnés dès leur naissance à une vie de souffrance et de privations. Leur innocence, déjà ternie par la dureté de leur existence, était une blessure ouverte dans mon cœur.

    Le Spectre de la Peste

    Mais la misère n’est pas le seul fléau qui frappe la Cour des Miracles. La peste, ce spectre hideux, rôde en permanence, guettant la moindre faiblesse, le moindre signe de défaillance. Elle se propage rapidement, favorisée par la promiscuité, le manque d’hygiène et la malnutrition. Les corps, déjà affaiblis par la faim et les maladies, sont une proie facile pour ce mal implacable.

    J’ai vu des familles entières décimées en quelques jours, emportées par la fièvre et les bubons. J’ai entendu les lamentations déchirantes des mères, pleurant la perte de leurs enfants. J’ai vu les corps, déformés par la maladie, jetés à la hâte dans des fosses communes, sans cérémonie, sans respect, comme de vulgaires déchets. La mort, ici, est banale, quotidienne, une présence familière qui ne suscite plus qu’indifférence et résignation.

    Le Docteur Armand, un homme dévoué et courageux, se bat sans relâche contre la peste. Il parcourt les ruelles, soignant les malades, distribuant des remèdes, prodiguant des conseils. Mais ses efforts sont vains, dérisoires face à l’ampleur de la catastrophe. Il est seul, épuisé, désespéré, mais il continue, animé par une foi inébranlable en l’humanité.

    “Monsieur,” m’a-t-il confié, un jour, les yeux rougis par la fatigue, “ce n’est pas seulement la maladie qui tue ces gens. C’est la misère, l’abandon, le manque d’espoir. Tant que ces conditions ne seront pas améliorées, la peste reviendra, encore et encore.” Ses paroles résonnent encore dans mon esprit, un appel à la conscience, un plaidoyer pour la justice.

    Les Voleurs et les Mendiants

    La Cour des Miracles est également un refuge pour les voleurs, les mendiants et autres marginaux, ceux que la société rejette et condamne. Ils se sont regroupés ici, formant une communauté à part, régie par ses propres règles et ses propres lois. Ils volent pour survivre, mendient pour manger, et se battent pour défendre leur territoire.

    J’ai rencontré Gavroche, un jeune garçon espiègle et débrouillard, qui vit de larcins et d’expédients. Il connaît tous les recoins de la Cour des Miracles, tous les passages secrets, toutes les cachettes. Il est le roi de la rue, respecté et craint par tous. Mais derrière sa façade de dureté, j’ai perçu une vulnérabilité, une soif d’affection, un besoin d’être aimé.

    J’ai assisté à une scène de vol, un pickpocket dérobant une bourse à un bourgeois imprudent. La victime, furieuse, a hurlé à l’aide, mais personne n’a bougé. Les habitants de la Cour des Miracles sont solidaires entre eux, ils ne dénoncent jamais leurs semblables. Ils savent que la survie dépend de la solidarité et de la discrétion.

    Mais cette solidarité a ses limites. La violence est omniprésente, les règlements de comptes sont fréquents. La Cour des Miracles est un lieu dangereux, où la vie ne vaut pas grand-chose.

    Un Espoir Fragile

    Malgré la misère, la maladie et la violence, il existe, au cœur de la Cour des Miracles, un espoir fragile, une lueur ténue qui refuse de s’éteindre. C’est l’espoir d’une vie meilleure, d’un avenir plus radieux, d’un monde plus juste.

    J’ai vu des femmes se battre pour protéger leurs enfants, des hommes travailler dur pour nourrir leur famille, des jeunes gens rêver d’un métier, d’une éducation, d’une vie digne. Ils sont les héros de la Cour des Miracles, ceux qui refusent de se laisser abattre, ceux qui continuent à croire en l’humanité.

    J’ai rencontré une jeune fille, nommée Marie, qui apprend à lire et à écrire grâce à un vieux prêtre, un homme bon et généreux. Elle rêve de devenir institutrice, d’aider les enfants de la Cour des Miracles à s’élever au-dessus de leur condition. Elle est l’incarnation de l’espoir, la preuve que même dans les endroits les plus sombres, la lumière peut jaillir.

    Le soleil se lève enfin sur la Cour des Miracles, chassant les ombres et dissipant la brume. Un nouveau jour commence, un jour de lutte, de souffrance, mais aussi d’espoir. Car même dans ce cloaque de misère, la vie continue, obstinément, courageusement, défiant la mort et la désespérance.

    En quittant la Cour des Miracles, je suis envahi par un sentiment ambivalent. Un mélange de tristesse, de colère, mais aussi d’admiration et d’espoir. J’ai vu la misère dans toute son horreur, mais j’ai aussi vu la résilience de l’âme humaine, sa capacité à survivre et à espérer, même dans les pires conditions. Il est impératif que les autorités prennent conscience de la situation de la Cour des Miracles et agissent pour améliorer les conditions de vie de ses habitants. Il est de notre devoir, en tant que citoyens, de ne pas oublier ces oubliés de la société, de ne pas fermer les yeux sur leur souffrance. Car leur sort est lié au nôtre, et leur humanité est une part de la nôtre.